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Comment créer une présentation pour engager son public et inspirer l’action?


"Parce qu’une présentation c’est beaucoup plus qu’un logiciel."




Il est 10 h 30, j’en suis à la troisième présentation d’un congrès pour les professionnels de la santé. Le conférencier me tourne le dos et lis ses diapositives remplies de textes. J’ai l’impression d’assister à un cours de lecture 101 dans une autre langue que le français, parce que je n’y comprends rien.



Je regarde autour de moi et la majorité des gens font leur prières (comprendre joue à candy crush sur leur cellulaire qu’ils tiennent caché sous la table). C’est trop long, compliqué, rempli de jargon et de graphiques complexes.

C’est royalement ennuyeux. Je décroche et je ne suis pas la seule.

On a juste hâte à la pause pour se pousser ailleurs.


Les conséquences de cette présentation ?

  • Perte de l’attention des participants liée à une surcharge cognitive, provoquée par une trop grande abondance de textes dans les diapositives;

  • Pertes d’informations importantes, livrées par l’expert, en raison du conflit d’attention créé par la lecture de la diapositive;

  • Perte de temps (et d’argent) autant pour le présentateur que pour les participants;

  • Non-obtention des résultats escomptés par le présentateur, à cause du manque d’engagement et la perte d’intérêt de l’auditoire;

  • Déception et confusion des participants : ils ne comprennent pas ce qui vient de se passer.

Personne n’est à blâmer. On a tous appris sur le tas en s’imitant mutuellement. On utilise les fameux modèles préformatés qui nous encouragent à ajouter des listes et des quantités phénoménales d’informations dans nos diapositives.


Mais personne ne semble se soucier des résultats.


La mémoire de travail qui filtre et traite ces informations est submergée. C’est un peu comme remplir un verre d’eau au-delà de sa capacité. Résultat : ça finit par déborder et se perdre.

Dans les 20 dernières années, plusieurs études, sur l’utilisation efficace des multimédias ont été effectuées. Le Dr Richard Mayer est l’un des pionniers sur le sujet avec plus de 500 publications à son actif. Malheureusement, le pont entre résultats probants et l’application sur le terrain ne s’est pas concrétisé.


N’ayant pas de guide précis, nous avons transposé le modèle de document académique… à l’écran. Imaginez un documentaire de l’émission « Découverte » présenté de cette façon ? Les cotes d’écoute en prendraient un coup !

Nos présentations doivent justement s’inspirer du modèle scénique d’un théâtre documentaire. Elles devraient inclure les 4 éléments suivants : attention, faits, interactions, émotions.

Alors, comment peut-on présenter autrement, à partir de bases scientifiques et de l’inspiration d’un théâtre documentaire pour transmettre des connaissances ?

Il faut élaborer une expérience agréable et interactive pour notre auditoire qui va :

  • Capter et maintenir leur attention;

  • Faciliter leur compréhension;

  • Maximiser leur mémorisation.

Et ainsi marquer leurs esprits pour longtemps…

Plusieurs stratégies s’offrent à nous pour atteindre ces principes de présentation.

On y arrive.

Développer une présentation comporte trois étapes, les 3C :

  • Création;

  • Conception;

  • Connexion.

Commençons par le processus de création.

À ce stade, la chose à éviter est d’ouvrir l’ordinateur. Les idées originales ne se trouvent pas dans l’ordinateur mais bien dans votre cerveau. Sortez plutôt papier, crayons et post-it.

L’auditoire

Voici les premières questions à se poser avant de débuter la conception du PowerPoint. Pensez tout d’abord à votre auditoire :

  • Qui est-il ?

  • Quel est son niveau d’éducation?

  • Est-il motivé à vous entendre ?

  • Que voulez-vous qu’il pense, qu’il ressente ?

  • Pourquoi est-il venu vous écouter ?

  • En quoi votre présentation lui sera utile ?

  • Qu’est-ce qui le passionne ?

  • Comment va t’il résister ?

  • Comment saura-t ’il quoi faire après votre présentation ?

  • Que voulez-vous qu’ils disent dans le corridor après ?

Ces questions sont cruciales, car elles vous permettront de bien saisir l’état d’esprit de l’auditoire.



Votre intention

Ensuite prenez le temps de définir à la lumière des questions précédentes, votre but ultime ainsi que trois actions que vous aimeriez que l’auditoire mette en action. Posez-vous la question « Pourquoi » plusieurs fois pour bien cerner les bénéfices qu’ils pourraient obtenir, par exemple :


1) J’aimerais que les participants apprennent à créer leur présentation autrement. Pourquoi?

2) Parce que leurs présentations sont ennuyeuses et peu utiles.

Pourquoi ?

3) Parce qu’ils n’utilisent pas les stratégies issues de données probantes et les meilleures pratiques de design et de marketing.

Pourquoi ?

4) Parce qu’ils n’ont pas le temps de lire les recherches, alors ils imitent et reproduisent… des présentations ennuyeuses.


Donc mon but ultime pourrait être :


Déstabiliser les participants en leur révélant les lacunes de nos présentations (un électro-choc) et leur démontrer comment une expérience significative avec des exemples concrets peut changer la donne et devenir marquant dans leur parcours.


Les trois ou quatre actions que j’aimerais qu’ils mettent en pratique?

1. Créer de façon analogue;

2. Diminuer la quantité de textes dans les diapositives;

3. Illustrer visuellement les propos;

4. Raconter plutôt que décrire.


Déjà votre perspective sera différente.


Remue-méninges

Il faut maintenant passer en mode créatif. Cette étape peut prendre plusieurs jours, d’où l’importance de commencer tôt. Les idées sont de nouvelles connexions, de nouvelles associations, qui se forment entre les connaissances antérieures stockées dans la mémoire long terme et les nouvelles informations qu’on reçoit.


Donc plus vous êtes exposés à de nouvelles informations, plus vous aurez plus de facilité à développer des nouvelles connexions. Au début de notre apprentissage de la lecture, on a peu de références dans notre mémoire à long terme. C’est donc un très grand effort d’apprendre les lettres, ensuite les mots, les phrases, la grammaire, la syntaxe. Vous voyez ce que je veux dire.


Pour savoir comment ça marche il faut comprendre comment le cerveau traite les nouvelles informations.



Le cerveau n’est pas une caméra.


Il utilise deux modes d’apprentissage le mode concentré et le mode diffus. Le mode concentré est activé par le côté gauche de notre cerveau. Dans ce mode on est totalement concentré et focus sur une tâche. Il est souvent Image: Site web de Barbara Oackley


utilisé pour des tâches qu’on doit faire par étape dans un sens logique.

Le mode diffus, est plutôt activé par le côté droit qui a une vision plus globale comme un scanner de l’environnement, c’est aussi le mode diffus qui est utilisé pour le traitement des émotions.


Aussitôt que notre cerveau est en mode automatique (par défaut) il s’active et forme des connexions improbables, qui ne s’activent pas en mode concentré.


Ce qu’on sait maintenant, c’est qu’on ne fonctionne pas seulement avec une seule partie de notre cerveau telle que le côté droit ou le côté gauche.


On a besoin d’utiliser les deux modes pour optimiser notre créativité. Il faut tout d’abord se concentrer de façon intense sur un sujet et ensuite passez au mode diffus pour laisser les associations d’idées se produire.


Vous avez donc une présentation à faire, vous avez une bonne idée du sujet, mais vous voulez l’approfondir davantage.


Pour aller plus loin que les faits et les statistiques, et trouver des exemples, des métaphores et des histoires voici quelques stratégies.


Tout d’abord comment noter nos nouvelles idées ?

  • En vous procurant un petit cahier de notes (ou votre cellulaire) et en observant tout ce qui pourrait être utile et parfois même inutile. Quand vous avez un projet vous devriez toujours inscrire à la fin de la journée ou de la semaine, les anecdotes, les histoires qui vous sont arrivées, les obstacles que vous avez surmontés. Un journal de réflexion.

  • Écrivez en rouge les idées qui vous viennent «out of nowhere». Si vous avez une bonne idée dans l’autobus écrivez-la tout de suite parce qu’elle disparaitra aussi vite qu’elle est apparue.

  • Ayez toujours votre carnet dans différents contextes (café, biblio, bureau, à l’extérieur, dans la nature) et observez avec vos sens, sons, odeurs, visuels, toucher, goût.



Mode concentré.

Cette photo par Auteur inconnu est soumise à la licence CC BY Fermez ordinateur, cellulaire, et toutes distractions : vous allez avoir besoin de silence ou d’un environnement calme. Concentrez-vous sur votre tâche pendant 30 minutes, suivies d’une pause de 5 minutes, répétez cet exercice maximum 3 fois. On appelle cette façon de faire la méthode POMODORO. Vous effectuez 3 périodes de « 30 min-5 min », ensuite vous avez droit à une plus longue pause de 45 à 60 minutes.


Vous allez focusser et faire des liens entre les idées que vous avez notées dans votre cahier et toutes vos connaissances sur le sujet.


Tapisser un mur de votre maison, appartement, bureau, avec des post-it en inscrivant une idée par post-it.

Un peu comme un détective qui fait une enquête et qui a besoin d’une vision globale de tous les suspects et les informations dont il a besoin pour réfléchir. Je l’appelle mon mur de détective. Vous allez maintenant l’enrichir avec une période de remue-méninge.


Il y a différentes façons de faire du remue-méninge.

En voici trois :



Outside the box :


1) Génère plusieurs idées, même si les associations ne semblent pas évidentes à première vue. L’important est d’inclure des contraintes de temps, sinon on s’éparpille.

2) On peut aussi faire une carte conceptuelle. On part d’une idée centrale et on développe pleins d’idées tout autour.



Inside the box :

1) On travaille avec les idées qu’on a et on tente de réorganiser le tout un peu comme si on avait des pièces de lego et qu’on voulait créer différentes formes.

2) On peut enlever des idées, in/out qu’est ce qui est essentiel pour que notre auditoire saisisse bien notre message

3) On peut multiplier, c’est-à-dire faire du pouce sur une idée. Par exemple, Apollo 13 faisait face à un problème technique qui menaçait leur survie. L’équipe d’ingénieurs au sol a mis toutes les pièces disponibles sur une table et ils ont construit un instrument qui allait leur sauver la vie. C’est ce qu’on appelle du remue-méninges « inside the box ».



Le Jootsing :

Finalement le « Jootsing », cute comme nom n’est-ce pas ? Je ne sais pas pourquoi mais j’ai l’impression que je vais faire du bungee !

C’est Douglas Hofstadter, savant américain en sciences cognitives, qui a introduit ce concept. Casser une règle quand on s’y attend le moins.


Pour faire du Jootsing, il faut :

  • Bien connaître le système

  • Reconnaître les règles

  • Jumper à l’extérieur du système (Ah! voilà le lien avec le bungee)


Voici quelques exemples :

  • Taxi---licence---Uber : Pour faire du taxi ça prend une licence…et si ça ne prenait pas de licence ? = UBER.

  • Cocktail---alcool---Mocktail

  • Rencontre interdisciplinaire---professionnels de la santé---Patient-Partenaire

  • PowerPoint-----linéaire----Prezi

  • Décrire un sujet : faits et statistiques-----raconter une expérience, composante émotion


Mode diffus

Vous ne voyez plus clair dans tout ça ? Ok, qu’est-ce qu’on fait ?


Il est temps de passer en mode diffus…parce qu’on ne peut pas tout faire en une séance. Il faut prévoir du temps pour laisser mûrir ces idées.


En mode diffus, le cerveau fera des associations qu’il n’aurait pas effectuées autrement. Il voit les choses avec un nouvel angle. Il faut que le temps en mode diffus soit assez long pour que votre esprit conscient ait complètement oublié votre blocage.


Ça prend toujours du temps pour développer les meilleures idées et il ne faut pas rester sur sa première idée qui est souvent biaisée.


J’appelle ça la période d’incubation. Comment initier ce mode diffus ? Voici plusieurs exemples :

  • Faire une marche : plusieurs écrivains célèbres ont trouvé l’inspiration lors d'une balade à pied.

  • Prendre une douche ou un bain

  • Se promener en auto

  • Faire du ménage





Un autre moment essentiel dans la création d’idée originale se passe durant le sommeil. Le même phénomène d’activation de connexions se produit durant cette période. Gardez-vous de quoi noter près de votre lit : vous serez surpris des idées qui surgissent juste avant de vous endormir et au réveil.


Laisser reposer vos idées quelques jours. Ce temps d’incubation va générer de nouveaux angles. Je sais, vous ne me croyez pas vraiment. Mais essayez-le, ce n’est pas dangereux quand même.

Après cette période en mode diffus, il se peut que de nouvelles idées apparaissent. N’oubliez pas de les noter rapidement sur votre mur de détective. Certaines solutions vous arriveront subitement et c’est normal.


Lorsqu’on se détache du mode concentré, les associations d’idées se poursuivent…


Alors voilà, ça fait le tour sur la manière de développer des idées de présentation.


Trois choses importantes à retenir? :


  1. Toujours avoir un carnet et un crayon ou votre cellulaire (mais je préfère le papier);

  2. Passer en mode concentré pour des périodes de 30 min et afficher une idée par post-it sur un mur;

  3. Passer en mode diffus pour laisser le cerveau connecter de nouvelles associations qui pourraient être très créatives.

Vous voilà maintenant prêt à passer en mode création de votre prochaine présentation.

  • Répondez tout d’abord aux questions concernant les participants;

  • Définissez votre but ultime ainsi que trois « call to action »;

  • Développez vos idées avec votre mur de détective.

Nous apprendrons dans le prochain article comment créer une structure invisible et fluide pour notre prochaine présentation.

A suivre…




Merci d’avoir lu jusqu’ ici 😉.

Johanne



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